La Story Nostalgie

C'est arrivé en juin à David Bowie

23 juin 2025 | 3 min 52 sec

Ce 16 juin 1972, plongeons dans le monde des disquaires qui mettent en vitrine le nouvel album d'un artiste dont le nom n'est pas encore familier auprès du grand public quoiqu'il soit actif depuis huit ans déjà : David Bowie.

Le 16 juin 1972, le disquaire, c'est un autre monde aujourd’hui disparu mais alors un point de passage obligé pour presque tout le monde. C’est là qu’on se procure ces chansons magiques qu’on a entendues à la radio, dans un juke-box, dans une émission de variétés à la télé ou chez des copains. Et puis il y a ceux, des passionnés, qui s’y rendent pour se renseigner sur ce qui vient de sortir, écouter un extrait et si ils accrochent, ils achètent et rentrent chez eux avec leur nouveau trésor. Car c’est ça la musique en 1972 : un bien précieux. Et si la pochette est belle, c’est encore mieux.

Et justement, en parlant de pochette, sur ce 33 Tours qui vient d’arriver chez le disquaire, on voit un type pâle, les cheveux couleur feu, poser dans une ruelle sombre avec la guitare nonchalamment en bandoulière. Et puis gros plan à l’arrière dans une de ces fameuses cabines téléphoniques rouges, c’est sûrement Londres. Le gars, on dirait un acteur échappé d’un film de science-fiction. Le titre de l’album est à rallonge en plus, c’est pas une première mais il est intriguant quand même : The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars. Oui, tout ça. Le chanteur se nomme David Bowie. Certains le connaissent. Il a déjà sorti pas mal de disques mais bon, c’est un second couteau qui n’a pas bien choisi son camp, entre rock, folk, expérimental, cabaret, bref il est aussi flou que la photo de la pochette de ce disque. Et là, il fait le coup de l’album concept façon Sgt Pepper des Beatles. Il pousse même un peu plus loin car cela semble raconter toute une histoire, celle d’une rockstar, un messie déchu, prophète de notre décadence. Ah bon ? On est décadent ?

Mais ce qu’on ignore ici c’est que David Bowie ne fait pas que raconter une histoire : il la vit de l’autre côté de la Manche, soir après soir sur scène, maquillé comme une drag-queen samouraï. Et le public britannique devient fou. En Belgique et en France, on ne va pas comprendre tout de suite. Trop bizarre, trop anglais. Mais dans les chambres d’adolescents, le disque commence à tourner, on s’en parle en classe ou à l’intercours. Car Ziggy est le premier vrai héros pop à dire : sois toi-même, même si ce “toi-même” vient d’une autre planète. Imaginez le choc pour tous ceux qui vivent à l’intérieur d’eux-mêmes, avec la peur de l’extérieur, de ce qu’on va dire. Et puis tous ceux qui, à cet âge, rêvent d’être quelqu’un d’autre, fantasment en s’endormant chaque soir dans la maison familiale remplie de silence et d’ennui.

There's a starman waiting in the sky… dit la chanson qui vient de sortir en 45 Tours. Personne pour imaginer que des décennies plus tard, elle sera utilisée dans une campagne de pub pour des télécoms. Ni que David Bowie sera alors un artiste connu de tous. Et respecté. Ce qui ne va pas être le cas, ni en cette année 1972, ni les suivantes, où il y aura plus de gens pour le détester que l’apprécier. Et encore moins que cet album sera un jour considéré comme un des plus grands de l’histoire. Mais quelle histoire ? Tout cela n’est que du présent, et de l’émotion, ce 16 juin 1972. D’ailleurs, ce soir, vous l’avez vu, cet homme des étoiles, juste avant de vous endormir avec le casque sur les oreilles. Et il vous regardait.

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Depuis plus de 20 ans, Brice Depasse vous emmène dans les coulisses des légendes du rock, de la pop, et des années 70 et 80 dans. Il vous fait voyager à travers les époques, en vous dévoilant les anecdotes les plus croustillantes et les histoires fascinantes des plus artistes de notre temps.

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