Radio
Événements
Concours
Passez sur Nostalgie
Musique & souvenirs
Il ne s'en jamais caché, il l'a merveilleusement chanté à de nombreuses reprises, Eddy Mitchell a gardé une infinie nostalgie heureuse de ses années P'tit Claude Moine à Belleville, le Paris d'une autre époque, en noir et blanc.
Vous êtes déjà allés à Belleville ? Ah il ne figure pas dans le circuit des 90 millions de touristes qui se pressent chaque année dans les rues de Paris. Belleville, c’est pile entre le parc des Buttes Chaumont et le cimetière du Père Lachaise. Un quartier qui portait mal son nom au début, avec ses baraques miséreuses et branlantes, rasées il y a un siècle, après la première guerre mondiale. C’est alors qu’on y a vu pousser des grands immeubles d’habitation, vaguement art déco, séparés par de larges boulevards comme celui d'Algérie, tiens !
Regardez celui qui porte le numéro 9 et qui est plutôt pas mal avec ses briques rouges et qui occupe tout le pâté de maison. C’est là que vit la famille Moine, dans un petit quatre pièces, deux chambres, une salle à manger et une cuisine qui fait aussi salle de bains. Faut donc se lever tôt le matin pour se laver, enfin en fonction de la complexité du menu du soir. Le petit Claude, teenager des années 50, voit depuis le balcon les anciennes fortifications de Paris abandonnées, dans lesquelles il va jouer aux cowboys et indiens avec ses copains du quartier.
Un quartier étonnant que celui de Belleville. Il y a des gens de toutes les nationalités, on ne voit ça nulle part ailleurs. C’est bien simple, le mec qui fait des sandwiches en face, c’est un Tunisien, dans la rue d’à côté, y a un restaurant chinois, et les voisins de palier sont Antillais. C’est toujours l’ambiance le soir, y a un monde là-dedans, mais ils sont gentils, ils apportent souvent des trucs à manger, des spécialités de leur pays. C’est exotique. Pas besoin de partir en vacances, qui d’ailleurs peut se payer un billet d’avion dans ce quartier.
Alors bien sûr, on n’est pas à Bisounoursland. Claude sait qu’il y a des mafiosi corses et pieds noirs qui se fritent avec des Magrébins. Et ils n’y allaient pas avec le dos de la cuillère, comme il m’a dit un jour dans sa loge avant un concert.
Plus personne ne l’appelle Claude Moine, depuis longtemps, mais Eddy Mitchell. Les bagarres entre bandes de blousons noirs sur la place du marché où tournaient les vespas étaient passées par là avec l’adolescence.
Puis il y avait eu la rencontre avec Johnny à la Trinité, de l’autre côté de Paris, l’audition chez Eddie Barclay avec les potes de son groupe qui s’étaient vu bombarder du nom de Chaussettes Noires.
Mais malgré les disques d’or, les grands espaces de l’Amérique que son succès lui a permis de visiter, les éblouissants plateaux de télévision, Eddy n’a jamais oublié les souvenirs de cinéma du p’tit Claude aux Tourelles, à la porte des Lilas, avec ses portes battantes à hublot, le soleil en céramique sur le sol du hall d’entrée et l’étoile bleue au plafond. Il avait même un toit ouvrant en été. C’était génial mais faut éviter la séance de l’après-midi pour la lumière et surtout les cris et plongeons des nageurs de la piscine juste à côté. Et puis il y avait le théâtre de Belleville où avait lieu l’émission de l’unique chaîne de télé, 36 chandelles. Claude se souvient avoir été très impressionné par un jeune chanteur en complet bleu, Charles Aznavour. On ne voyait que lui ! Le Eddy d’aujourd’hui ne regrette qu’une chose : les jeunes de toute nationalité semblaient s’entendre très bien, tous ensemble, quand il était môme.
Depuis plus de 20 ans, Brice Depasse vous emmène dans les coulisses des légendes du rock, de la pop, et des années 70 et 80 dans. Il vous fait voyager à travers les époques, en vous dévoilant les anecdotes les plus croustillantes et les histoires fascinantes des plus artistes de notre temps.