Le film du Splendid que vous n'avez jamais vu

Si vous étiez en âge, comme moi, d’être allé le voir au cinéma mais que vous ne l’avez pas fait et que vous vous demandez comment vous avez pu faire une chose pareille tellement vous vous marrez chaque fois que ce film passe à la télé, n’ayez pas honte. Car vous n’êtes pas le seul ; le film n’a pas beaucoup marché en salles, peut-être n’avions-nous pas envie de retrouver les bronzés à la neige mais plutôt à nouveau sous le soleil tropical, allez savoir.

Et c’est là que je vais vous raconter une histoire étonnante. Le semi-échec de ce deuxième épisode des Bronzés n’a pas découragé son producteur, Yves Rousset Rouard, qui entre parenthèses se trouve être le parrain de Christian Clavier et vient de faire fortune avec le film Emmanuelle.

Le producteur leur propose donc de se mettre immédiatement au travail sur un Bronzés 3 dont l'action se déroulerait cette fois aux Etats-Unis (motif de producteur : pour ceux qui s’en souviennent, le dollar était au plus bas à la fin des années 70).

Banco ! Christian Clavier, Thierry Lhermitte et Gérard Jugnot imaginent un riche Américain proposant à une couple de jeunes Français de conduire sa voiture depuis New York jusqu’en Californie moyennant défraiements et frais d’essence. Un voyage au cours duquel ils vont rencontrer d’autres Français tous plus barrés les uns que les autres et à la fin duquel la voiture ne sera plus qu’une épave.

Et donc, afin de pouvoir écrire le scénario complet et les dialogues, les voilà partis pour un voyage New-York - Los Angeles. Voyage qui est une première pour Gérard Jugnot dans un pays qui n’est alors pas réputé pour être le plus sûr au monde. Ainsi arrivé sur place, Gérard se rend très vite compte que son anglais scolaire n’est pas compris par le concierge de l’étrange hôtel new yorkais où ils sont descendus. La porte de sa chambre ferme mal voire pas du tout et il s’en inquiète. Son intuition est bonne car une fois l’attachée de leur maison de distribution informée du nom de l’hôtel, elle vient vite les chercher car il se trouve être réputé pour être une plaque tournante du trafic de drogues ; il y a eu de nombreuses fusillades et descentes de police d’où la porte maintes fois défoncée de la chambre de Gérard.

Mis à part toutes les nuits que Jugnot passe dans les motels avec une chaise bloquant sa porte et un mauvais trip avec une cigarette qui défonce offerte par deux jeunes filles qui les invitent un soir dans leur maison où il hurle qu’on les attaque et se cache derrière un divan, le voyage à travers les Etats-Unis s’est bien déroulé.

Il se termine à San Francisco, autre ville où à l'époque règne l'ultraviolence sous la surveillance de policiers avec des chiens même dans les allées d’un cinéma où ils vont voir le nouveau Clint Eastwood.

De retour à Paris, Clavier, Jugnot et Lhermitte remettent leur scénario à leur producteur qui face à une brutale et spectaculaire remontée du dollar renonce au projet des Bronzés 3, désormais intitulé Drive-Away. A défaut de New York, les Bronzés tourneront à Paris, sans Michel Blanc parti vers d’autres horizons ; il s’agira d’un soir de Noël pas comme les autres dans le bureau d’une association dont tout le monde connaît le nom depuis 40 ans.