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BOB DYLAN 1962

Bob Dylan, SDF à New York en 1962

Ce samedi 19 mars 2022, cela faisait exactement 60 ans que sortait le premier album de Bob Dylan : une histoire qui est loin d'être un conte de fées. Je vous raconte ...

Le premier 33 Tours de Bob Dylan s’appelle Bob Dylan, tout simplement ; le chanteur occupe toute la pochette avec sa casquette chaude et son blouson en mouton retourné. C’est d’ailleurs vêtu ainsi que vous pouvez le croiser dans les rues de Manhattan où il traîne depuis un peu plus d’un an, sans domicile fixe et sans un sou en poche.

Bob est arrivé un soir d’hiver de l’extrême nord des Etats-Unis et depuis il joue seul s'accompagnant de sa guitare et son harmonica dans des cafés théâtres de Greenwich Village, au sud de Manhattan. Des endroits où on vous annonce vite fait et où vous interprétez deux ou trois chansons avant de passer entre les tables avec le chapeau et puis c’est tout. Le jeune Bob Dylan sans domicile fixe loge chez des gens à gauche, à droite, mange souvent dans la cuisine de ces cafés théâtre qui sont des caves ou des magasins reconvertis où il faut gueuler pour se faire entendre.

BOB DYLAN 1962

Bob Dylan en 1962, vêtu comme sur la pochette de son album, avec à sa gauche, Suze Rotolo, sa petite amie (avec laquelle il posera sur la mythique pochette de l'album suivant) et face à lui Lena Spencer, patrone du Caffè Lena à Saratoga Springs, dans le nord, un des endroits où il se produisait à l'époque de la bohème.

Des gars comme Bob Dylan, il y en a des centaines à New York en 1962 ; il n’a aucune chance de devenir célèbre. Mais comme il le dit lui-même, le seul moyen de réussir c’est d’être convaincu qu’on est le meilleur, pas de le dire mais de tout faire pour l’être et de croire en soi. Le reste vient naturellement comme ce jour où il est invité chez une chanteuse pour l’accompagner à l’harmonica. C'est là qu'il rencontre John Hammond, LE producteur de la Columbia qui a lancé Benny Goodman, Count Basie ou encore Billie Holiday et qui va produire le disque. Et là, Hammond, rien qu’en le voyant, se dit : ce mec a quelque chose. Il lui propose immédiatement un contrat après lui avoir demandé si il chante aussi.

Quelques jours plus tard, Dylan se retrouve dans son bureau et signe le premier papier qu’il lui tend. Imaginez ce gamin de vingt ans sur le trottoir, sortant de la Columbia et s’arrêtant devant un disquaire pour s’émerveiller devant sa vitrine ; il a tellement envie d’y entrer pour lui dire : vous ne me connaissez pas mais bientôt je serai en vitrine avec les autres.

Quatre mois après, Bob est en studio. Juste un ou deux micros, un ingénieur du son, John Hammond et lui qui aligne les chansons, les unes derrière les autres en l'espace de trois après-midi, écoutez …

La Columbia en est quitte pour 400 dollars de frais, une misère certes, mais Hammond sait que le disque ne passera pas à la radio, un folkeux seul avec sa guitare qui chante les chansons des autres, le succès est totalement improbable. La suite lui donne raison : il ne se vend en effet que 2.500 exemplaires de ce premier album. Chez Columbia, on dit alors de Dylan qu'il est le péché mignon de producteur de Hammond : il n’a en effet pas reçu une critique dans la presse sauf un petit filet prémonitoire dans le Billboard Magazine disant en substance : Quand Dylan trouvera son style, il aura des millions de fans.

Et de fait, Dylan dit alors à Hammond : maintenant, on ne va plus enregistrer que mes chansons. Quatre mois plus tard il enregistre Blowin’ in the wind

BOB DYLAN 1962

Le Fat Black Pussycat, un des cafés théâtres de Greenwich Village aujourd'hui disparu est un des premiers endroits où Bob Dylan chanta Blowin' In The Wind.

Depuis cette chanson qui a été reprise par des centaines d'artistes, Bob Dylan a publié 90 albums officiels et 95 singles, recevant au passage le Prix Nobel de Littérature.