N Nostalgie
Marie Fredriksson Roxette
© ISOPIX

La chanteuse du groupe Roxette a rejoint d'autres étoiles

Marie Fredriksson se battait depuis plusieurs années contre une tumeur au cerveau.

La chanteuse Marie Fredriksson du groupe suédois Roxette est décédée à l'âge de 61 ans. 

«  C'est avec une grande tristesse que nous devons annoncé que l'une de nos plus grandes artistes populaires a disparu. Marie Fredriksson est décédée au matin du 9 décembre des suites de sa maladie  », a annoncé Marie Dimberg, la manageuse du groupe.

Le groupe Roxette s'était fait connaître dans les années 80 et 90, avec des tubes comme «  The Look  » et «  Listen to your heart  », Brice Depasse vous en fait la Story :

Roxette, un nom mondialement célèbre pour un duo qui a vendu en trente ans plus de cinquante millions d’albums et vingt millions de singles au cours d’une aventure qui a débuté en 1986.

Per Gessle et Marie Frederiksson se rencontrent pour la première fois en 1978 à Halmstad, une charmante ville balnéaire au sud de la Suède. Per est alors le guitariste d’un groupe fondé deux ans plus tôt : Gyllene Tider, ce qui signifie l’âge d’or, celui du rock’n’roll dont ils sont fans. Trois ans plus tard, alors que Marie s’est lancée dans une carrière solo après avoir chanté avec un autre groupe, elle donne un coup de main à son copain Per en assurant les chœurs sur scène puis sur le deuxième album de Gyllene Tider qui devient comme le précédent N°1 au Hit Paräde car oui, ils chantent en suédois et bien sûr, leur album est inexportable. 

Aussi quand le troisième album, toujours avec la petite Marie dans les choeurs est à nouveau N°1, le patron de leur firme de disques se dit qu’il faut tenter le coup en Amérique, comme autrefois Erik le Viking. L’album prochain sera chanté intégralement en anglais. 

Une fois publié, un nouveau carton, les gars de chez Capitol USA ont juste une remarque à faire : «  vous n’auriez rien de plus prononçable comme nom de groupe ?  ». Per songe alors à une chanson du groupe américain Dr Feelgood : et pourquoi pas Roxette ? 

Malheureusement le disque passe complètement inaperçu. MTV ne veut même pas du clip du premier single. Résultat : il se vend à peine 8.000 exemplaires de leur LP Heartland café. La défaite est amère pour le groupe qui décide malgré le succès énorme qu’ils connaissent en Suède de se séparer momentanément. Le jeune Per Gessle, 26 ans, enregistre un album solo avec dans les chœurs sa copine Marie Fredriksson qui de son côté y va aussi du sien. Le patron d’EMI Suède, leur maison de disques, leur suggère un dites, vous qui vous entendez si bien, vous devriez chanter ensemble. Ca ferait du bruit.

Pourquoi pas ? Mais ça sera en anglais cette fois.

Per traduit une de ses chansons, Svarta glas, qui devient Neverending love : il sort en single, toujours sous le nom de Roxette, même si c’est en Suède et que cela n’a plus rien à voir. Le disque se vend à 50.000 exemplaires, un hit énorme. Il n’en faut pas plus pour pousser les deux artistes à enregistrer un album qui sort en octobre 1986. Chanté en anglais également, il fait un malheur en Suède et fonctionne assez bien dans toute la Scandinavie et un peu au Canada. Mais il ne sort nulle part ailleurs, aucun autre affilié d’EMI n’en ayant voulu. Il est pourtant sympa cet album, c’est de l’excellente pop à l’Américaine avec un duo homme/femme très bien balancé. Mais parce qu’un étudiant de Minneapolis rentre de Suède avec un disque de Roxette que la radio locale puis les autres se sont mises à jouer, le groupe voit son deuxième album sortir aux Etats-Unis. Une histoire que bien sûr les journaux et chaînes de télévision relaient.

Début 1989, EMI qui avait les artistes sous contrat depuis bien des années décide de sortir l’album mondialement. The look est un énorme succès, N°1 dans plus de quinze pays dont les Etats-Unis où il va rester classé durant 71 semaines et finir platine comme en Grande-Bretagne. Le single suivant étant à nouveau N°1, Roxette vient déjà de dépasser l’exploit de Abba. On ne parle maintenant plus que d’eux d’autant que les deux autres singles suivants sont aussi de gros succès.

Le succès est mondial, aussi quand Touchstone Pictures s’apprête à sortir un film à gros budget mettant en scène Richard Gere et Julia Roberts, ils demandent à Roxette d’écrire un titre original pour la bande sonore. Mais trop débordé par la tournée et la promotion, Per Gessle, leur propose une chanson de Noël qu’ils avaient enregistrée en 1986 à la demande de EMI Allemagne. Ce que Touchestone refuse, insistant pour avoir un titre original. Alors ce sera rien du tout, je n’ai pas envie de me griller pour une soundtrack.

Après avoir remonté le film, Touchstone finalement cède : on veut bien de la chanson. Juste qu’il va falloir réenregistrer quelques trucs pour se débarrasser des arrangements façon père Noël et le tour est joué. Après tout, cette chanson n’est pas l’atout majeur de la B.O. de Pretty Woman. Et pourtant, bien que n’étant pas le premier single à sortir, généralement la meilleure place dans une bande originale, celle dont on voit le plus le clip avec le trailer qui passe partout, la chanson de Roxette s’emballe dans les charts et les airplays radio. Trois mois après la sortie du film It must have been love est N°1 aux Etats-Unis et dans 20 autres pays. C’est LE tube de l’été. Il va rester classé 17 semaines dans le Billboard qui l’élira deuxième meilleure chanson de l’année. C’est aussi le troisième N°1 américain pour les artistes suédois qui assoient leur record. Enorme succès en Belgique mais aussi en Allemagne où il va rester classé neuf mois, le titre de Roxette emmène le CD de la BO de Pretty Woman vers des sommets inespérés, il s’en vend des millions dans le monde et trois millions rien qu’aux Etats-Unis.

Nous sommes au début des années 90. Pour le groupe Roxette, est venu le cap très difficile de l’album qui suit un énorme succès mondial. Il n’y a pas que les jeunes artistes qui s’y fourvoient, cela arrive aussi aux grandes stars confirmées, regardez David Bowie après Let’s dance. On le sait dans les rangs d’EMI, c’est chez eux qu’il a sorti le catastrophique Tonight en 1984. Aussi comptent-ils investir deux millions de dollars dans la promotion de cet album.

Heureusement le guitariste et compositeur Per Gassle est au sommet de son art et de plus, il est bien entouré. Joyride qui sort en 1991 est sûrement ce que le duo peut offrir de mieux : les quatorze chansons qu’il contient, plus rock que sur leur précédent album, sont vraiment dans l’air du temps. Elles sont bétonnées et elles vont tout raffler sur leur passage, enfin presque ! La ballade à laquelle Roxette invite le monde convainc. C’est d’ailleurs la première fois que le groupe est N°1 des singles dans son propre pays, à l’instar de 25 autres pays dont une nouvelle fois les Etats-Unis, à tel point que les Américains ne savent plus très bien si les deux membres de Roxette sont américains ou européens. Leur musique leur parle tellement.

Pour réussir un album, il faut plus que des hits, il faut une tournée digne de ce nom. Le Joyride tour est la première véritable tournée mondiale de Roxette. Un solide pari : la scène n’est pas l’atout majeur des deux artistes qui vont devoir convaincre partout où ils passeront. C’est à ce prix qu’ils vont gagner de vrais fans et s’inscrire dans la durée. Marie et Per convainquent. Leur tournée est un succès : à son terme, ils auront joué devant 1.500.000 personnes en seulement 107 concerts. Fin 1992, Joyride est la plus grosse vente de Roxette : 11 x platine aux USA, 6 x en Argentine et en Suède, 7 x disque d’or en Allemagne. Mais l’arbre cache la forêt car si Joyride a fait un triomphe, les autres singles se sont mal vendus aux Etats-Unis. En cause, EMI ayant absorbé d’autres firmes de disques, les restructurations et licenciements ont déboulonné ceux qui s’occupaient de leur promotion.

Et puis, il y a autre chose, une autre musique, des voix nouvelles qui viennent du fin fond des Etats-Unis, de Seattle. Le grunge qui débarque cette année-là par l’entremise de Nirvana et de Pearl Jam va donner un solide coup de vieux à la musique de Roxette. Le public va bientôt lui tourner le dos en masse, emporté par une vague qui ne laissera aucune chance à ses concurrents comme autrefois le punk. Dommage, la chevauchée était belle. D’autant plus que Roxette fait un pas de côté, trop tôt dans sa carrière.  En effet, sortir un album de bric et de broc n’est pas une bonne idée à ce stade. Tourism est composé de titres qui n’avaient pas été repris sur leurs deux précédents albums ainsi que des versions live et acoustiques enregistrées pendant la longue tournée qui les a empêchés d’écrire et de répéter du nouveau matériel comme on dit dans le métier.

Alors bien sûr, l’album se hisse encore à la première place en Allemagne, en Scandinavie mais il y reste peu de temps. Le public a vite compris, surtout quand il entend les singles à la radio qui passent peu à l’image de How do you do. Aux Etats-Unis, où le groupe régnait, l’album  n’approche même pas le Top 100. Et on panique en haut lieu. Tant et si bien que pour la sortie de Crash boom bang ! le tout nouvel album de Roxette qui paraît en 1994, on part en ordre dispersé. La pire bêtise sera commise aux Etats-Unis où l’album sort en version raccourcie offerte dans les fast food McDonald’s. Du coup, l’album ne rentre même pas dans le Billboard alors qu’il est encore bien classé en Europe et en Amérique du Sud.

Si le premier single de l’album (Sleeping in my car) monte encore dans le top 20 d’une quinzaine de pays, il en redescend très vite. Les autres parutions sont des désastres, en définitive on est passé en deux ans de 11 millions d’exemplaires pour Joyride à 1 million pour le nouvel album. Roxette a perdu ses fans et la confiance d’une maison de disques qui n’a pas fait grand-chose pour freiner la chute. Ainsi va la dure loi du showbizness. Le Greatest Hits qui sort en juillet 1995, n’enraye pas la chute : il ne sortira pas aux Etats-Unis avant cinq ans.

La chute est triste mais l’histoire est belle, celle d’un groupe suédois, le seul à avoir vraiment conquis les Etats-Unis : il nous laisse un très grand nombre de hits et de bons souvenirs à ceux qui sont allés les voir sur scène à Forest National en 1991.