La Story Nostalgie

1965 L'année Louis de Funès (Episode 5)

13 septembre 2025 | 7 min 11 sec

Brice Depasse vous raconte comment l’enchaînement de succès et surtout la longue carrière des films en salles ont fait de Louis de Funès, jusque-là spécialiste des petits rôles, l’acteur N°1 du cinéma européen en 1965.

Parlez-en à vos parents, grands-parents, en 1965, ils ne sont pas allés voir que Sean Connery alias James Bond, les Beatles, John Wayne et Omar Sharif. Non, ils sont comme un spectateur sur cinq, allés voir au moins un film avec Louis de Funès.

Un acteur qui a bien changé de registre car figurez-vous que l’année précédente, l’ORTF, l’unique chaîne de télé a diffusé une quinzaine de films avec lui, dont certains où il tient, déjà, le premier rôle. Mais ce n’est pas celui qui, métamorphosé, explose à l’écran : nerveux, roublard, vaniteux, ignoble avec ses subalternes et larvaire devant les plus grands que lui. Un personnage qu’il a développé en interprétant au théâtre le rôle de Bertrand Barnier dans la pièce Oscar, et qui lui a valu une première consécration. Tout Paris, toute la France et la Belgique ont couru voir cette comédie, attendant la fameuse tirade du nez dont tout le monde parle. Il y a eu, bien sûr, des tests, des répétitions, mises au point au cinéma, comme dans Des pissenlits par la racine, Carambolages, Faites sauter la banque ou encore Pouic Pouic, qui au début des années 60 font des succès mais se noient partie du flux de films qui nourrit la programmation de milliers de salles depuis la fin de la guerre. Des cinémas de 2000 places où on entre sans savoir le film qu’on va voir, avec un premier long métrage, des actualités et un dessin animé, avant le grand film.

C’est totalement incompréhensible et pourtant qui alors pour remarquer dans le jeu de Louis de Funès autre chose que des grimaces. Car on n’a jamais vu ça, un premier rôle qui utilise autant les mimiques que la parole, … et puis ses colères ! Les gens finissent d’ailleurs par y croire. Il est comme ça dans la vie. Et la rumeur court, dans les milieux du théâtre et du cinéma, comme quoi, Louis de Funès serait colérique, qu’il s’emporterait sur ses partenaires et les techniciens. De Funès s’en amuse mais ne contredit pas, il laisse la rumeur devenir sa réputation. Il se confiera un jour à une journaliste en disant : on dit que je brouiller avec tout le monde. Ça fait tellement peur à la troupe que tous jouent sans rigoler et c’est tant mieux. C’est le public qui doit rire, pas nous. Et comme je suis moi-même rieur et qu’il ne faut pas me pousser, faire régner la terreur est le seul truc que j’ai trouvé pour faire rire le public sérieusement.

Et puis c’est pour cela que tout le monde s’est pressé en salles en cette année 1965, pour ces colères tellement spectaculaires qu’elles en deviennent irrésistiblement drôles. Cruchot, Saroyan et Juve, flic ou voyou, ont imprimé sur la pellicule une image tellement forte que soixante ans après, ils restent les seuls personnages du cinéma des années 60 à être toujours diffusés sur une chaîne généraliste en prime time avec la certitude que le lendemain, ils figureront en tête du box-office. Comme les Rolling Stones, finalement, pour qui l’année 1965 a aussi été celle de la révélation, du phénomène.

La Story Nostalgie

Depuis plus de 20 ans, Brice Depasse vous emmène dans les coulisses des légendes du rock, de la pop, et des années 70 et 80 dans. Il vous fait voyager à travers les époques, en vous dévoilant les anecdotes les plus croustillantes et les histoires fascinantes des plus artistes de notre temps.

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